Pékin, automne 2023 : 1 – premières impressions

Publié le par Ding

Le temple du ciel, septembre 2023

Le temple du ciel, septembre 2023

J’ai retrouvé Pékin le 4 septembre 2023, dix ans après en être parti en voiture pour Paris (voir notre journal, 5 septembre 2013). Entretemps, je n’y étais passé que le temps d’une visite officielle (voir bloc-notes 2015), ce qui est le meilleur moyen de ne rien voir. Je m’attendais donc à de grands changements, comme lorsque nous avions retrouvé la capitale chinoise en 2009, un an après les jeux olympiques de 2008.

Pékin de nuit (photo SDGSAT)

Pékin de nuit (photo SDGSAT)

Relative surprise : la ville a en fait assez peu changé, du moins dans sa partie centrale. Il en va différemment dans les quartiers lointains, dont la croissance s’est poursuivie. Avec une population officiellement supérieure à 21 millions d’habitants, Pékin compte désormais 27 lignes de métro totalisant plus de 1 000 km et ce n’est pas terminé.

Ce qui a changé est moins le cadre que la façon de vivre. Certains changements sont clairement positifs, d’autres peuvent être perçus de manière plus nuancée par le nouvel arrivant. Pour n’en citer que quatre :

Immeubles bordant le deuxième périphérique, près de Dongzhimen

Immeubles bordant le deuxième périphérique, près de Dongzhimen

- L’air est moins pollué, même si l’on peut toujours débattre des différents indicateurs. Le sujet n’est plus dans toutes les conversations comme il l’était au début des années 2010. Sans être toujours limpide, le ciel est plus dégagé. D’après les mesures de l’ambassade américaine, peu suspectes de complaisance, la concentration en particules pm 2,5 a diminué de 60 % environ de 2013 à 2019, ce qui la laisse bien au dessus des normes recommandées. Les orages de sable sont devenus rares grâce aux effets de reboisement des provinces voisines. C’est anecdotique, mais ces lignes ont été écrites sous un beau ciel bleu un samedi d’octobre. Fin octobre cependant, un fort épisode de pollution nous a ramenés dix ans en arrière pour quelques jours.

Deux raisons à ce progrès : le déménagement des industries polluantes, qui était déjà bien engagé au début des années 2000. Et la conversion du parc automobile, avec un nombre croissant de voitures et autobus électriques reconnaissables à leurs plaques vertes.

Pékin, automne 2023 : 1 – premières impressionsPékin, automne 2023 : 1 – premières impressions
Pékin, automne 2023 : 1 – premières impressionsPékin, automne 2023 : 1 – premières impressions

L’incitation est forte car la plaque verte, réservée aux véhicules 100 % électriques, permet d’échapper au permis coûteux qui est obligatoire pour posséder un véhicule thermique ou hybride en plaque ordinaire. Les voitures électriques sont plus répandues – environ 10 % du parc pékinois, 5,5 % du parc chinois - qu’en France, résultat d’un politique très volontariste. Un quart à peu près des voitures neuves étant électriques, la proportion va continuer à augmenter rapidement. Avec beaucoup de Tesla produites en Chine et des modèles chinois de voitures électriques très modernes, parfois presque futuristes, produits par une centaine de marques. Même les voitures « drapeau rouge »  des dirigeants chinois, jadis dévoreuses de carburant (voir notre article de 2013), existent aujourd’hui en version électrique, avec une silhouette entièrement modernisée et le drapeau rouge sur le capot à peine visible : le modèle HS9, 2 700 kg, 95 000 euros. Le bénéfice écologique est discutable et je n’en ai vu qu’une seule jusqu’à maintenant mais c’est un signe des temps. Le constructeur prévoit de lancer treize nouveaux modèles électriques d'ici 2025.

Les nouvelles Hongqi (drapeau rouge), thermique (H9) et électrique (E-HS9)Les nouvelles Hongqi (drapeau rouge), thermique (H9) et électrique (E-HS9)
Les nouvelles Hongqi (drapeau rouge), thermique (H9) et électrique (E-HS9)

Les nouvelles Hongqi (drapeau rouge), thermique (H9) et électrique (E-HS9)

Pour comparer, les limousines de parade "drapeau rouge", conçues pour les défilés officiels, de 1958 à 2019 ; ces modèles sont exposés au musée du Parti.Pour comparer, les limousines de parade "drapeau rouge", conçues pour les défilés officiels, de 1958 à 2019 ; ces modèles sont exposés au musée du Parti.Pour comparer, les limousines de parade "drapeau rouge", conçues pour les défilés officiels, de 1958 à 2019 ; ces modèles sont exposés au musée du Parti.

Pour comparer, les limousines de parade "drapeau rouge", conçues pour les défilés officiels, de 1958 à 2019 ; ces modèles sont exposés au musée du Parti.

Officiellement, 65 % des taxis de Pékin sont électriques, dans la rue ils le sont presque tous. Beaucoup d’autobus (90 % parait-il) sont électriques et les premiers bus expérimentaux à l’hydrogène circulent en ville.  Pourtant, une voiture électrique qui roule en Chine émet aujourd’hui bien plus de CO2 qu’une voiture thermique car le mix électrique reste très carboné. Et, malgré des mesures un peu comparables pour maîtriser le nombre de voitures, Pékin n’est pas Singapour et la circulation aux heures de pointe y reste difficile, voire plus difficile qu’avant.

Pékin, automne 2023 : 1 – premières impressionsPékin, automne 2023 : 1 – premières impressions

- Pékin redevient le « royaume du vélo » qu’elle n‘était plus. Des vélos « vintage » de l’époque ancienne se rencontrent encore, de même que des VTT dernier cri. Ce qui fait masse, cependant, ce sont les vélos en libre service que l’on voit partout en très grand nombre, bien plus qu’en France. Ces vélos sont bien sûr accessibles grâce à des applications sur téléphones. Pas de stations fixes genre Vélib, sauf dans des localités périphériques. Le secteur a sans doute connu, ici aussi, des turbulences, car les marques ont changé depuis nos articles précédents. Des scooters électriques sont aussi présents en grand nombre, utilisés entre autres par des myriades de livreurs, qui rendent les trottoirs parfois risqués. Pas de trottinettes en libre service, en revanche.

- La vie est devenue (encore) plus numérique qu’auparavant. Les échanges entre les personnes passent par la messagerie WeChat, sans laquelle il est devenu quasiment impossible de vivre. Alors que naguère on échangeait cérémonieusement des cartes de visite, on numérise aujourd’hui le QR code de la personne rencontrée. Surtout, les paiements en espèces, naguère omniprésents en Chine, ont largement disparu au profit des paiements électroniques par téléphone. Le moindre vendeur de rue vous tendra son QR code à numériser sur WeChat ou Alipay, à moins que vous lui tendiez le vôtre. Faut-il le dire ? Les premiers jours, cette généralisation des paiements par téléphone est déstabilisante pour le nouvel arrivant qui se trouve infirme. Dès que l’habitude est prise, on se demande au contraire comment des reliques telles que le billet de banque ou la carte bancaire peuvent encore exister dans le reste du monde.

Notre ancien immeuble d'habitation (1996 - 1999) dans le quartier diplomatique de Sanlitun. La rue et le quartier sont désormais clos par des grilles et des portails, infranchissables pour le public.

Notre ancien immeuble d'habitation (1996 - 1999) dans le quartier diplomatique de Sanlitun. La rue et le quartier sont désormais clos par des grilles et des portails, infranchissables pour le public.

- La vie et la ville sont enfin (encore) plus sécurisées qu’avant. Un agent de sécurité est désormais présent dans chaque autobus. L’accès à la place Tiananmen, cœur symbolique de la ville et du pays, est désormais soumis à des contrôles dignes d’un aéroport. Pour accéder à cette place, prendre un train, ou entrer dans la municipalité de Pékin, il faut numériser sa pièce d’identité au moins une fois et parfois deux ou trois. Le contrôle est renforcé partout et il est de plus en plus technologique.

Publié dans Nouvelles de Pékin

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