Journal Pékin Paris (2013-2014) : 4 - en Oman et aux Emirats
Suite de Journal Pékin Paris (2013-2014) : 3.3 - en Inde
164ème et 165ème jours, 15 et 16 février, Mascate : Après 2 heures 30 de vol depuis Bombay, nous arrivons à l’aéroport de Mascate à minuit. Cette arrivée de nuit évoque un transit lointain (été 1991) et nocturne par ce même aéroport, au cours d’un voyage interminable de Lyon à Singapour par les défuntes compagnies aériennes Air Inter et UTA. L’une des routes d’UTA vers Singapour passait en effet par Mascate.
Nous reculons nos montres de 1 h 30. Oman et les Emirats arabes unis sont à TU + 4 : 4 heures de retard sur la Chine, 1 h 30 sur l’Inde, 3 heures d’avance sur l’heure française d’hiver.
Les formalités d’arrivée faites (des visas nous sont délivrés à l’aéroport), nous gagnons Mascate proprement dite (58° 25’E, 23° 36’N) au milieu de la nuit. L’autoroute urbaine sur laquelle le taxi roule à 120 km/h procure aux voyageurs arrivant d’Inde un dépaysement immédiat. Après quatre mois sur les routes du Népal et de l’Inde, nous retrouvons aussi la conduite à droite, que nous conserverons jusqu’à la fin du voyage.
Nous nous réveillons le 15 avec un grand beau temps, une température idéale (22° en milieu de journée), la mer sous nos fenêtres et partons à la découverte de Mascate. Bien que beaucoup d’Indiens y vivent, le dépaysement venant d’Inde est total. Mascate est très propre, bien ordonnée et prospère sans tomber dans l’opulence tapageuse de Dubai ou même de Koweit. On roule à grande vitesse sur des voies rapides ombragées de palmier, avec le spectacle de la mer et des collines rocailleuses toutes proches. Les Omanais sont aimables et tolérants avec les étrangers (les touristes sont assez nombreux) mais conservateurs : toutes les femmes sont voilées et la plupart sont vêtues de noir.
Nous parcourons à pied la corniche en bord de mer entre Mutrah et Old Mascate, avec quelques points d’intérêt particulier :
- le marché aux poissons de Mutrah, avec de très beaux poissons, notamment des thons de belle taille ;
- le souk de Mutrah, avec de nombreuses boutiques d’or et d’argent ;
- de nombreux forts dominant la mer, dont certains construits naguère par les Portugais lorsqu’ils contrôlaient le détroit d’Hormuz ;
- le palais du Sultan dont l’énorme yacht est ancré à proximité ;
un dhow, comme nous enavions vu construire au Kerala
- Old Mascate, juste à côté, semble appelé ainsi par antiphrase tant tout est rénové de fond en comble et presque désert le samedi après-midi ; c’est une petite citée administrative tirée à quatre épingles (du coup, elle semble neuve), presque une ville morte pendant le week-end ;
- Ruwi, la ville indienne, où nous retrouvons un peu du désordre et de l’ambiance que nous venons de quitter.
Nous arpentons le lendemain la longue plage qui part du quartier de Qurm; elle est belle et très propre, avec des oiseaux de mer ; elle s’étend sur des kilomètres, en passant devant la réserve naturelle de Qurm, une petite mangrove au cœur de la ville ; on longe aussi le quartier diplomatique.
la station Vélib de Mascate
Mascate est au total agréable pour le visiteur, mais les quartiers anciens sont si bien entretenus ou rénovés qu’elle semble entièrement neuve et un peu artificielle.
166ème jour, 17 février, Mascate Nizwa, 177 km : Oman est le premier pays depuis le début du voyage où la location de voiture sans chauffeur est passée dans les mœurs. Nous quittons Mascate peu après 10 heures dans un robuste pick-up 4x4 de location, le genre de véhicule qui permet de transporter cinq personnes et un dromadaire sans difficulté (non, nous n’avons pas essayé). Nous empruntons une voie express en parfait état sur laquelle nous sommes presque les seuls à rouler à moins de 100 km/h. La rupture par rapport aux routes de l'Inde est totale. La route se dirige vers le sud et s’élève doucement entre des montagnes rocailleuses, dans un décor semi-désertique. Nous franchissons une nouvelle fois le tropique du Cancer.
Nizwa (57° 32’E, 22° 56’N,alt. 450 m) est assez touristique. Nous avons la chance d’y trouver un toit sans avoir réservé, ce qui n’allait pas de soi. Le petit centre de la ville est agréable avec un fort ancien mais très restauré et un marché lui aussi refait à neuf. Les bananes et les melons sont omanais mais beaucoup de fruits et légumes sont importés du Pakistan, d’Egypte, d’Inde ou d’ailleurs.
La plus jolie partie de la ville ne figure pas sur les guides touristiques et les groupes ne s’y aventurent guère : c’est la vieille ville dans la palmeraie, avec ses murailles en moellons couvertes de pisé et ses petits canaux souterrains qui permettent à la végétation de pousser au milieu du désert, comme les karez du Xinjiang. La population est visiblement mixte, arabe et indienne avec beaucoup d’immigrés du Kerala.
La nuit tombe peu après 18 heures, avec la belle lumière du désert sur les montagnes qui dominent la ville.
167ème jour, 18 février, Nizwa Seeb, 336 km : nous quittons Nizwa vers 8 h 30. les directions sont généralement très bien indiquées en Oman, mais il y a quelques exceptions. Faute de signalisation, nous ne trouvons pas la voie express qui quitte la ville vers l’ouest et devons faire un détour par le nord (via Tanuf). Nous arrivons à Jabrin une heure plus tard et visitons le fort, qui est beau et restauré juste comme il faut.
Autre visite de fort quelques minutes plus tard à Bahla. Très beau fort aussi, mais la restauration vient d’avoir lieu et ça se sent un peu trop. Belle vue sur les anciennes murailles de la ville qui enserre la palmeraie.
Nous gagnons ensuite Al Hamra, avec de nouvelles difficultés d’orientation. Nous visitons Al Hamra, Misfat et traversons le Jebel Hajar, d’al Hamra à Rustaq (voir article séparé).
A Rustaq, où nous arrivons à la nuit tombante, les difficultés d’hébergement commencent. Il nous faut près d’une heure pour trouver l’unique auberge de l’endroit et elle est si décevante que nous déclinons. Nous tentons notre chance à Nakhal, 53 km plus à l’ouest, mais en vain ; nous apercevons en revanche le fort, spectaculaire bien qu’il ne soit pas éclairé. Nouvel échec à Barka, sur la côte. C’est finalement à l’approche de Seeb que nous trouvons un gîte convenable. Il s’en est fallu de peu que nous devions rentrer dès ce soir à Mascate. Le tourisme omanais manque encore d'infratructures.
168ème jour, 19 février, Seeb Mascate et excursion à Qurayat, 314 km : nous quittons Seeb par un temps couvert et traversons Mascate d’ouest en est avec quelques difficultés d’orientation. Nous partons ensuite vers le sud-ouest en direction de Sur. La route est parallèle à la côte et traverse la chaîne orientale de Hajar. Belles montagnes dans un décor semi-désertique.
Nous retrouvons la mer à Qurayat, à 85 km de Mascate. Nous visitons le fort – de petite taille mais bien présenté – et le port de pêche. Du port, une belle plage déserte s’étend vers l’est, avec de nombreuses espèces d’oiseaux de mer.
Nous rentrons ensuite dans l’intérieur du pays et traversons sur 20 km des collines semi-désertiques, jusqu’au village de Mazra. Le village est niché dans une palmeraie, de part et d’autre d’une petite rivière.
Un petit fort, assez croulant, est perché sur une colline. Le tout est dominé par la montagne.
Près de là, le barrage de wadi Dayqat est le plus grand du pays. Nous regagnons Mascate à la nuit et gagnons un hôtel sur le port de Mutrah.
169ème jour, 20 février, Mascate : visite le matin de la mosquée Sultan Qabous, la grande mosquée de Mascate. Edifice imposant et tout à fait moderne mais plutôt sobre et réussi.
Caractéristiques notables : le grand lustre (pas vraiment sobre, lui), les vitraux, l’immense tapis de la salle de prière, 70 m de côté, le plus grand du monde semble-t-il. Les touristes sont admis et autorisés à photographier, chose peu imaginable dans de nombreux pays dont l’Inde, mais le matin seulement, quand les fidèles sont absents.
Nouvelle promenade sur l’anse et la corniche de Mutrah l’après-midi.
Nous nous installons ensuite dans un petit hôtel de Ruwi, la partie indienne de Mascate, en prévision du départ matinal de demain.
170ème jour, 21 février Mascate Dubaï, 420 km : nous quittons Mascate aux premières lueurs de l’aube (6 heures) et prenons la voie express vers le nord-ouest. Nous la connaissons déjà jusqu’à Seeb, c’est nouveau ensuite. La route longe la côte, mais trop loin pour que la mer soit visible. Cette plaine littorale de la Batinah diffère de ce que nous avions vu jusqu’ici : elle est irriguée et cultivée (dattes, bananes, légumes) et densément peuplée. Les mosquées se comptent par centaines sinon par milliers. Leur décoration colorée (nombreuses coupoles bleues) reflète une influence perse.
Au poste-frontière de Hatta
Nous passons vers 9 h à Sohar, la grande ville du nord omanais, ancien port de pêche devenu une ville industrielle. Un peu plus au nord, au village de Sinas, nous quittons la route côtière et bifurquons vers l’ouest. La route quitte la plaine et aborde des collines semi-désertiques. On arrive très vite aux postes frontière de Wajaja (sortie d’Oman) et de Hatta (entrée aux Emirats arabes unis). Les formalités se passent sans difficulté pour nous, malgré un peu de pagaille, mais elles sont longues : les deux arrêts prennent deux bonnes heures. Nos passeports reçoivent un tampon (gratuit) d’entrée aux Emirats. La frontière étant plus sinueuse que la route, nous la franchissons trois fois avant de quitter définitivement Oman et même cinq fois en raison d’un aller retour entre les postes frontière. Un nouveau contrôle des passeports a lieu lors du dernier passage de frontière.
Ces formalités terminées, nous reprenons la route vers l’ouest, traversons une petite zone de désert avec des dunes de sable. Les tours de Dubai sont bientôt visibles dans le lointain, avec le Burj Khalifa qui domine de très haut toutes les autres. Nous arrivons à Dubaï (55° 21’E, 25° 15’ N) à 14 heures.
Faute de temps, nous nous limitons à deux courtes visites accessibles par le métro tout neuf :
- le quartier de Burj Khalifa, la plus haute tour du monde (828 m), qui était en construction lors de notre première visite (mai 2007) ; la comparaison avec les tours voisines se passe de commentaire ;
nous tombons en arrêt devant la sculpture de Lutfi Romhein représentant un couple arabe ;
- le quartier de Palm Jumeirah, plus loin au sud-ouest et son front de mer chic et branché près de la fameuse presqu’île artificielle du palmier.
C’est suffisant pour nous plonger dans l’ambiance de cette ville-phare de la mondialisation. Architecture débridée et étonnant creuset de populations arabes, européennes, indienne, philippine … Ici les femmes n’hésitent pas à se promener en tenue courte et les mosquées sont presque discrètes. Dubai vit au rythme du monde entier, comme New York et Singapour. Mascate, où nous étions ce matin, nous paraît déjà comme un village reculé. Le dépaysement est complet, et ce n’est sans doute rien par rapport à celui qui nous attend demain.