Sur les routes du Mexique à la Terre de feu : retour d’expérience
Abstract : from September 2024 to February 2025, we drove 13,800 miles across Mexico, Central America and South America in our vintage Suzuki 4WD car. Eventually we reached « the end of the world », that is the southernmost Argentinian city of Ushuaia. Some mountain roads in Central America and the Andes were, to say the least, not easy. But everything went well overall. We discovered magnificent countries and experienced warm hospitality everywhere.
« On ne va jamais aussi loin que quand on ne sait pas où l’on va. » Christophe Colomb
Du 9 septembre 2024 au 28 février 2025 nous avons parcouru 22 179 kilomètres de Veracruz à Ushuaia, sur les routes du Mexique, d’Amérique centrale et d’Amérique du sud ; et plus de mille kilomètres en autocar, train et bateau. C’est un gros morceau de notre grand voyage autour du monde en 888 jours. Nous avons parcouru treize pays, certains à deux ou trois reprises : Mexique, Guatemala, El Salvador, Honduras, Nicaragua, Costa Rica, Panama, Colombie, Equateur, Pérou, Bolivie, Argentine et Chili. Notre voiture a traversé la mer trois fois en cours de route : entre le Panama et la Colombie, car aucune toute ne relie ces deux pays, et à deux reprises au Chili.
Voiture électrique de fabrication chinoise à Tuxtla Gutiérrez (Mexique, photo 1) ; borne de recharge à Esquipulas (Guatemala), l'une des très rares que nous avons vues (photo 2)
Il n’était pas question, pour cette partie du voyage, d’utiliser un véhicule électrique, le nôtre ou un véhicule de location. Nous n’avons aperçu que quelques voitures électriques fabriquées en Chine. Les bornes de recharge sont très rares sauf au Panama.
Débarquement de la voiture à Veracruz (photo 1) ; près de Tikal au Guatemala (photo 2) ; vers Esquipulas au Guatemala (photo 3) ; gué près de San Juan del Sur au Nicaragua (photo 4) ; au volcan Chimborazo en Equateur (photo 5) ; sur le lac Titicaca en Bolivie (photo 6) ; près du salar d'Uyuni en Bolivie (photo7) ; l'arrivée à Ushuaia (photo 8)
Nous avons donc sollicité une nouvelle fois notre fidèle 4x4 Suzuki de 1999, déjà utilisé de Pékin à Paris par la route des Indes en 2013 et 2014, puis de France au Sénégal fin 2023 et début 2024. Cette voiture devenue « une partie de nous-mêmes », comme nous l’a dit un ami de rencontre, a été à la hauteur : elle a vaillamment tenu la distance malgré des centaines de kilomètres de pistes, de la boue et des trous, des gués à passer et plusieurs montées à plus de 4 000 mètres ; jusqu’à 4 800 sur les pentes du volcan Chimborazo en Equateur. Elle a semblé faiblir dans la pampa argentine mais des mécaniciens de village, dont un se nommait Victor Hugo (!), sont parvenus à la requinquer. Nous avons poussé un ouf de soulagement et de reconnaissance en arrivant à Ushuaia, au bout de cette longue route.
Borne-frontière Guatemala - Honduras (photo 1) ; frontière Colombie - Equateur (photo 2) ; frontière Equateur Pérou (photo 3) ; entrée en Argentine près de San Sebastian (photo 4)
Nous avons franchi les nombreuses frontières sans difficulté majeure même si chaque franchissement avec une voiture demande entre une et trois heures et ressemble à une petite course d’obstacles bureaucratiques : contrôle des passeports par le pays que l’on quitte, annulation du permis d’importation de la voiture, contrôle des passeports par le pays où l’on arrive, délivrance d’un nouveau permis d’importation. Le carnet de passages en douane, que nous avions utilisé pour des voyages précédents, n’est pas utile en Amérique latine où des permis d’importation temporaire sont délivrés facilement. La procédure douanière pour la voiture est souvent gratuite ; dans certains pays, il faut acquitter de petites taxes.
La voiture quitte Colon (Panama) en conteneur (photo 1) ; le cargo Cristal A qui a transporté la voiture de Colon à Carthagène (photo 2) ; sortie du conteneur à Carthagène (Colombie, photo 3)
Comme il n’existe aucune route à travers la jungle du Darien, entre le Panama et la Colombie, notre voiture a dû prendre le bateau de Colón à Carthagène des Indes dans un conteneur de quarante pieds partagé avec une autre voiture. C’est une procédure bien rodée car utilisée par de nombreux voyageurs et mise en œuvre par deux transitaires très efficaces. Ce passage est néanmoins coûteux et il prend du temps. La traversée prend à peine deux jours mais la séquence complète a duré vingt jours en raison des procédures au départ et à l’arrivée.
Nous avons pu souscrire une assurance au tiers pour l’Amérique centrale (sauf Costa Rica et Panama) et une autre pour l’Amérique du sud, ce qui nous a dispensés de souscrire une police à chaque passage de frontière. C’est une simplification bienvenue.
Les conditions de route ont beaucoup varié d’un pays à l’autre et parfois au sein d’un même pays. Comme nous l’avions prévu, les meilleures routes ont été pour la fin : autoroutes au Chili, la plus grande partie de la route 40 dans la pampa argentine. Nous avons souvent emprunté la route panaméricaine qui relie l’Alaska au sud du continent américain. Mais celle-ci est plus un réseau de routes qu’une vraie route et les conditions de circulation y sont très inégales. Même sur les routes principales, nous avons parfois roulé sur des chaussées en mauvais état ou non revêtues. En Amérique centrale et dans la cordillère des Andes, il existe très peu de viaducs et de tunnels : les routes serpentent à l’infini et présentent souvent des pentes impressionnantes.
Dans plusieurs villes, certaines rues sont de véritables toboggans ; la palme revient à La Paz où nous sommes montés de 3620 à 4050 mètres en 3,8 kilomètres et avons dû utiliser la vitesse lente de notre 4x4. Au Guatemala et en Colombie, nous avons peiné sur des routes de montagne très chargées, au milieu de milliers de camions. Presque partout, nous avons perdu beaucoup de temps avec les réducteurs de vitesse qui se comptent par milliers dans les villes et les villages, souvent un tous les deux cents mètres. Le Guatemala détient peut-être la palme avec ses innombrables "tumulos". Il est de toute manière nécessaire de conduire lentement et de ne conduire que de jour. Nous nous y sommes astreints et bien nous en a pris.
Policiers et gendarmes nous ont contrôlés assez souvent mais toujours avec courtoisie, nous laissant souvent repartir plutôt que de tenter de déchiffrer un permis de conduire ou une carte grise incompréhensibles pour eux. Nous avons sans doute été mieux traités que les conducteurs locaux. Une seule amende pendant le voyage : au Pérou, pour avoir roulé en feux de position alors que les feux de croisement étaient obligatoires – et que beaucoup de conducteurs roulaient tous feux éteints. Au Honduras, nous avons pris une autoroute en construction à contre sens. Aucun policier, heureusement, ne s’en est aperçu. Sur les routes de vignobles argentins, il a fallu souffler deux fois dans l’alcootest.
Des voitures et un camping car français d'époque en Colombie (photos 1 à 3), au Pérou (photos 4 et 5) et en Argentine (photos 6 et 7)
La criminalité nous inquiétait un peu. L’Amérique centrale et les pays andins n’ont pas très bonne réputation à cet égard. Tout s’est finalement bien passé moyennant quelques précautions : quasiment pas de sorties nocturnes ni de promenades dans les quartiers déshérités, traversée du Honduras réduite au strict nécessaire. Nous avions bien lu les fiches « conseils aux voyageurs » du Ministère des affaires étrangères et nous étions inscrits sur le Fil d'Ariane.
Produite au Mexique de 1964 à 2003, la Coccinelle reste courante sur les routes du Mexique (photos 1 à 7), des pays voisins (photo 8 au Guatemala) et du Pérou (photos 9 et 10)
Nous n’avons pas campé pendant cette partie du voyage. Nous avions envisagé de le faire en Argentine et au Chili mais le froid est arrivé au sud de Santiago et nous avons été heureux de trouver des hôtels ou de petites maisons chauffées le soir. Nous avons trouvé des hébergements sans grandes difficultés, même pendant les vacances de l’été austral. Et avons été accueillis avec beaucoup de gentillesse malgré notre pratique très limitée de l’espagnol. Il ne faut pas compter parler anglais ou français : très peu de gens parlent les langues étrangères, y compris les professionnels du tourisme.
Ce grand voyage s’est donc passé dans de très bonnes conditions. Il nous a permis de découvrir des sites magnifiques et de comprendre un peu mieux ces pays que nous connaissions peu ou pas du tout. Nous avons quitté hier les rivages de l’Atlantique que nous ne reverrons plus. Notre dernière étape est à Punta Arenas, dans le sud du Chili, d’où sont écrites ces lignes. Rendez vous bientôt sur l’autre rive du Pacifique.
#adm888
Voyez aussi les articles précédents et notre journal quotidien de voyage au Mexique puis en Amérique centrale et en Amérique du sud.