Road Trip Tamil: le sud des Ghats Occidentaux

Publié le par Ding Thibaut

Après avoir fêté à Chennai notre premier Noël à cinq, le moment est venu de nous séparer quelques jours. Un petit voyage seul avec Adrien, c’est la première fois que nous serons seuls père et fils plusieurs jours d’affilé. Adrien aime beaucoup la voiture, aucun trajet n’est trop long pour lui. J’en profite pour l’emmener avec moi découvrir une autre partie des Ghats Occidentaux, l’extrémité sud de la chaîne, plus précisément la région qui entoure Kodaikanal dans les Palani Hills. En octobre, nous étions déjà partis par la route avec Adèle et Adrien dans les Nilgiris, quelques centaines de kilomètres plus au nord. Lors de voyages précédents, nous étions aussi allés plus à l’ouest de la chaîne dans le Wayanad (Kerala).

Bref passage à Trichy 

Nous quittons Chennai le matin du 27 décembre. Comme prévu, nous arrivons peu avant midi aux environs de Trichy (Tiruchirappalli en tamil). Nous sommes ici au centre du Tamil Nadu, approximativement à mi-chemin entre Chennai et le Cap Commorin. Comme nous n’avons jamais visité de temple en Inde du Sud et que nous sommes à proximité d’un site majeur, je me décide à quitter « l’autoroute » pour aller visiter le temple de Sri Ranganathaswamy. Les premières fondations de ce temple consacré à une forme de Vishnou remontent au XIe siècle. Il se situe sur une île de la Cauvery, grand fleuve d’Inde du sud.

L’approche du temple confirme mes craintes: on ne visite pas un grand temple hindou aussi simplement que l’on visiterait une église en marge d’une route nationale en France. Après avoir parcouru plus de 300km dans la matinée, nous restons bloqués presqu’une heure dans les derniers kilomètres qui précèdent l’entrée du temple. Finir à pied ? Ouvrir la fenêtre au milieu de ce chaos serait déjà une épreuve. En sus de la pagaille habituelle d’un centre ville indien, il y a ici chaque jour des milliers de pèlerins qui arrivent en bus, à pied, ou en moto. Lakshmikant, notre chauffeur, nous dépose au début de la zone « sans voiture ». Sur ses conseils, nous sortons de la voiture pieds nus pour ne pas risquer de perdre nos chaussures dans une montagne de chaussures à l’entrée du temple. Plongés instantanément dans la chaleur, la pollution et le bruit, nous nous retrouvons engloutis dans une foule chaotique où se mélangent fidèles, mendiants et marchands du temple. Des motos et rickshaws se faufilent en klaxonnant ajoutant du bruit au bruit. Autant dire que je serre fort la main d’Adrien !

Road Trip Tamil: le sud des Ghats Occidentaux

Lorsque nous atteignons enfin l’entrée du temple proprement dit, je découvre une large file d’attente  de personnes entassées qui s’étend sur plus de 300m ! C’est à se demander comment les enfants en ressortent sains et sauf. Pour nous, l’expérience d'immersion a assez duré. Je me souviens pourquoi nous n’avions pas encore visité de temples: notre truc c’est plutôt la nature et ses grands espaces. D’ailleurs ceci est censé être un voyage à la montagne !

Avant de quitter Trichy, nous visitons le musée du train. S’il n’y a que deux locomotives, le musée est assez instructif quant à l’histoire du réseau ferré de la région. Une ligne Madras - Pondichéry passait tout près de chez nous, là où je fais du roller aujourd’hui.

Road Trip Tamil: le sud des Ghats Occidentaux

Cardamon House 

J’ai organisé le voyage la veille du départ. A mon habitude, j’ai cherché les hôtels les plus éloignés des villes. Cardamon House est une jolie propriété de quelques bungalows en pleine campagne. A 120km au sud-ouest de Trichy, après Dindigul, Athoor est un tout petit village au milieu des champs, bordé de collines qui marquent le début de la chaîne des Ghats Occidentaux. Cardamon House est encore plus reculée, au bord d’un lac marécageux à 6km du village. La zone est à peine cartographiée sur Google Maps et pas du tout sur le GPS Renault. Autant dire que l’endroit est très difficile à trouver. Mais une fois arrivés, l’épisode Trichy semble très loin. Le calme règne. Il n’y a que le bruit des oiseaux et l’odeur des fleurs. L’air est pur. La silhouette des montagnes se découpe dans les dernières lueurs du jour. La température est douce, presque fraîche. Après le dîner, Adrien m’aide à installer mon télescope sur le toit de notre bungalow pour observer les étoiles.

Road Trip Tamil: le sud des Ghats Occidentaux

Bien que ce ne soit pas un site touristique répertorié, je décide de passer la journée du 28 ici plutôt que de passer deux nuits dans la réputée Kodaikanal. Ainsi nous passons une belle journée au vert. Le matin nous faisons une marche autour du lac et de ses marais. Je suis fier de mon garçon de 5 ans qui marche avec enthousiasme plus de 6km sous le soleil indien sans demander à se faire porter. De retour de la marche nous nous rafraîchissions dans la belle piscine (made by Desjoyaux !). Après le déjeuner au milieu des colibris et la sieste, une partie de mille-bornes s’impose. Lorsque les températures retombent, nous repartons en promenade pour nous immerger dans la vie rurale d’Athoor. Adrien est en vélo et je le suis, en courant. Il n’y a quasiment aucun véhicule par ici. Bel entrainement pour moi en vue du semi-marathon de Chennai le 6 janvier.

Kodaikanal

Demandez à un Indien du sud ce qu’évoque pour lui Kodaikanal. S’ensuivra une description bucolique de la «  Princess of Hill stations » où sont tournées nombres de scènes romantiques de films kollywoodiens. En réalité, c’est une concentration de pollution atmosphérique, visuelle et sonore. Au milieu de ce développement anarchique et hideux propre aux hill stations indiennes, il y a néanmoins des vestiges du temps où les Anglais en avaient fait une agréable retraite pour que les privilégiés du système colonial puissent fuir la chaleur des plaines. Bungalows d’époque, manoirs, églises, jardin botanique, promenade panoramique… Les environs du lac sont parsemés de cet héritage qui offre de belles surprises par intermittence.

Road Trip Tamil: le sud des Ghats Occidentaux

J’ai décidé de venir ici pour un site en particulier : la forêt de pins. Plantée par les anglais, elle constitue l’une des « attractions » de Kodaikanal. Je m’attendais donc à toutes les nuisances qui vont avec, et non à une expérience authentique de nature comme nous en avons vécu en trekkant dans l’Himalaya indien. Mais voir des pins, les toucher, sentir leur odeur qui m’évoque les bois du Grand Gravier au Revest… cela vaut bien quelques concessions. En définitive, c’est une expérience inoubliable. La foule de touristes tamils mélange les couleurs de l’Inde du sud au charme d’une forêt continentale en créant une ambiance unique. Si l’on n’est pas allergique à l’Inde, on adore cet endroit et ses « nuisances » s’intègrent finalement bien dans l’atmosphère générale. J’espère que le petit film ci-dessous illustre bien cette opinion. Je regrette qu’Adrien ait préféré rester avec Lakshmikant dans la voiture.

Mannavanur Lake 

Venir si loin pour une forêt de pins qui s’étend sur un kilomètre à peine, c’est quand même un peu juste. Etre à presque 2000m d’altitude sans pouvoir apprécier les paysages de montagne, c’est tout de même frustrant. Bien que nous ayons un avion en fin d’après-midi à Madurai, je décide de partir en excursion le matin  pour ne pas rester sur une frustration. Le lac de Mannavanur est répertorié parmi les « things to do », ce qui est un mauvais présage. Mais il faut compter 1h15 de route « without trafic » pour l’atteindre, ce qui effectue un premier filtre. En partant très tôt, nous y arrivons juste pour l’ouverture du parc, avant les cars de touristes. Il y a des montagnes de détritus aux abords du ticket office et des échoppes de nourriture. Mais fort heureusement, les Indiens qui jettent leurs emballages sont généralement ceux qui ne marchent pas plus de 500m. C’est d’autant plus vrai là où il n’y a pas de temple qui justifierait un effort physique. Il y a bien une offre de « horse riding », mais elle reste limitée. En conclusion, le lac de Mannavanur est un bel endroit où l’on peut marcher dans une nature propre ! En marge du site protégé, il y a aussi des belles petites routes secondaires pour faire du vélo agréablement.

Nous mettons plus de deux heures à regagner Kodaikanal à cause d’une heure d’embouteillage à l’approche de la forêt de pins et d’une grotte où a été tourné un film tamil très populaire. Il n’y a plus le temps de déjeuner, il faut enchaîner les 40km de lacets puis prendre la route de Madurai. Heureusement, l’autoroute de Madurai est l'une des meilleures routes d’Inde donc nous arrivons largement à temps à l’aéroport.

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Publié dans Nouvelles de Delhi

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