A travers le Tamil Nadu et la chaîne des Nilgiris
En ce début d'octobre, les enfants ont une semaine de vacances. Romy est dans son huitième mois de grossesse. J'entreprends donc un petit voyage seul avec Adèle et Adrien, dans notre état du Tamil Nadu. Nous partons en voiture avec Lakshmikant, notre chauffeur, ce qui plaît particulièrement aux enfants. Notre destination est un petit coin de nature dans les monts Niligiris, mais l'idée est aussi de faire un road trip pour voir l'Inde de l'intérieur.
De Chennai à Salem via Pondichéry
Notre première étape est Salem, à environ 350km de Chennai. En route nous faisons halte à Pondichéry. Comme lors de notre découverte de la ville en 2015, je suis aveuglé dans un premier temps par l'ambiance française du quartier historique. Si bien qu'après la visite de l'Institut français, je me laisse tenter par une promenade à pied avec les enfants. Mauvaise idée : j'avais oublié que la réalité de l'Inde avait le dessus, même ici. Il y a certes des trottoirs, mais ils sont encombrés par des voitures mal garées nous obligeant à marcher sur la route. Ils sont ombragés, mais la chaleur de midi reste forte. Les klaxons, les pots d'échappements, les motos et voitures qui nous frôlent sans ménagement rende la promenade désagréable. Le bruit et les odeurs de moteurs ne semblent pas incommoder plus que ça les Indiens. Ceci dit, une fois attablés dans une crêperie bretonne sur une jolie terrasse à l'abri de la rue, Pondichéry offre une expérience unique en Inde.
De Pondichéry à Salem, le paysage est verdoyant mais quelque peu monotone. L'autoroute est une voie rapide à deux voies qui se rétrécissent à une route étroite et encombrée à chaque traversée de village. Personnellement, ces villages ne me donnent pas envie de m'arrêter. Entre le bruit et les odeurs de la circulation anarchique, l'étalage de détritus, on apprécie l'air conditionné qui permet de ne pas ouvrir les fenêtres. J'ai bien conscience en écrivant ceci que c'est l'attitude du touriste dans son bocal et pas celle du voyageur. Retranché dans mon confort, je passe probablement à côté de rencontres et me prive de voir comment vivent les gens à quelques mètres de la route. De ce point de vue, voyager en vélo change beaucoup de choses. Comme il faut bien faire une pause, nous marquons un arrêt après un péage. L'endroit de ne fait pas rêver, mais les enfants attirent vite la sympathie des camionneurs arrêtés là pour changer un pneu. L'occasion de les faire monter dans un authentique camion indien chargé de canne à sucre. De Salem, les enfants retiendront le "luxe" de l'hôtel. Et moi l'embouteillage monstre pour l'atteindre.
Coonoor et Ooty
Mardi matin nous reprenons la route pour la station d'altitude de Ooty. En fin de matinée nous arrivons au pied de la montagne, à Metupalayam. C'est le point de départ du fameux "toy train", un petit train à vapeur d'époque, de fait souvent remplacé par une locomotive diesel. Il monte à Ooty en plus de cinq heures, soit cinq fois plus de temps qu'une voiture. Mon projet était de le prendre sur la dernière section à partir de Coonoor, mais je ai pas réussi à vaincre le système de réservation en ligne.
Arrivés en voiture à la gare de Coonoor, je renonce définitivement lorsqu'on me dit de venir faire la queue une heure avant l'ouverture du guichet sans assurance d'avoir des places. La déception est vite oubliée après un déjeuner dans un cadre somptueux, un cottage de l'époque coloniale très bien conservé avec une vue panoramique et jardin à l'anglaise.
L'après-midi nous nous promenons au milieu d'arbres centenaires d'espèces issues du monde entier. Il s'agit de Sim's Park, le jardin botanique de Coonoor. Nous gagnons finalement Ooty à la tombée de la nuit. A 2250 m d'altitude, la fraîcheur est bienvenue pour nous qui habitons dans la plaine. C'est précisément ce que recherchaient les Anglais de Madras qui ont fondé cette station au début du XIXe.
Avalanche Lake
Fort de mon expérience de Dalhousie, Shimla, Mussoorie, Darjeeling et autres hill stations, j'ai prévu de rester le moins longtemps possible en ville. Mercredi matin, nous partons ainsi en excursion à Avalanche Lake. La petite route de montagne qui y mène vaut en elle-même le déplacement. Nous nous perdons plusieurs fois malgré les GPS, et c'est tant mieux ! Loin de Ooty, nous avons le luxe de pouvoir arrêter la climatisation et ouvrir les fenêtres pour le plus grand plaisir des enfants. Nous roulons à 15 km/h sur une route défoncée et parsemée de flaques boueuses. La forêt est dense et la route offre ponctuellement de beaux points de vue sur les lacs.
Arrivés à notre destination, les agents de la réserve nous disent qu'il est interdit de marcher. Il faut monter dans un van qui nous fera faire une visite guidée. Le prochain départ aura lieu quand il y aura assez de touristes. J'avais lu qu'Avalanche Forest Reserve était un endroit merveilleux pour la marche, mais il n'était pas précisé que les autorisations se demandaient longtemps à l'avance via des intermédiaires agréés. Heureusement, nous avons un plan B : faire du vélo (pour les enfants) et du roller (pour moi) sur une petite route sans issue en amont de la réserve, autour d'Emmerald Lake. Un garde forestier rencontré par hasard a bien essayé de nous faire payer le droit de prendre notre pique-nique au bord du lac, mais en vain. Pas d'autres nuisances à déplorer, et un cadre aussi plaisant que sécurisant pour lâcher les enfants en vélo sur la route.
Trois jours en pleine nature au milieu des Nilgiris
De retour à Ooty, nous quittons aussitôt la ville pour gagner la destination finale de notre voyage : un gîte forestier en pleine nature. Après 45 minutes sur des petites routes, nous devons laisser la voiture. Nos hôtes viennent nous chercher pour nous emmener au gîte. Il faut marcher 20 minutes dans la forêt pour y arriver. Il n'est pas question de traîner, car les éléphants et autres animaux sauvages commencent à rôder à l'approche de la nuit. Le gîte est bâti à flanc de montagne. Lorsque le brouillard se lève, on aperçoit les plaines du Karnataka d'un côté et du Kerala de l'autre. On ne voit ni village ni route aux alentours. Il n'y a que deux chambres pour les clients et nous sommes les seuls. Notre chauffeur a une chambre dans le toit au-dessus de la notre. Les deux guides et le cuisinier occupent une autre aile de la maison. En fait, tous participent à la préparation des repas et tout ce petit monde sortira avec nous en excursion.
Dès notre arrivée, nous avons la chance d'observer un cervidé depuis notre balcon. C'est un « sambar deer » et les enfants réussissent à utiliser les jumelles pour bien l'observer. Le gîte est entourée d'une haute clôture électrique pour tenir les éléphants à distance. Comme l’indiquent les empreintes et les dégâts vus lors de la marche d'accès, ils savent pourtant bien passer en force ce type de clôture pour se nourrir des carottes, radis et autres légumes des champs alentours. Les villageois montent la garde la nuit dans des cabanes perchées en haut des arbres pour tenter d'éloigner les pachydermes par des bruits stridents. Pour nous, la nuit est calme si ce n'est le bruit de la pluie qui tombe.
Au réveil, nous apercevons dans la montagne des gaurs sauvages. Il s'agit de bovidés faisant penser aux bisons américains. Pour ne pas risquer de se faire charger par ces animaux massifs, le guide modifie l'itinéraire et nous emmène marcher dans un autre secteur. Si le brouillard ambiant et la bruine créent une atmosphère envoûtante à mon goût, les enfants l'apprécient moins. La pluie s'intensifie alors que nous atteignons la crête : il faut trouver un abri. En quelques instants, le guide nous taille un abri dans les fourrés avec sa machette. Pendant presque tout notre séjour, nous avons la tête dans les nuages et profitons des rares instants sans pluie pour sortir. Mais même au gîte, nous vivons au grand air, protégés de la pluie par le préau. Chaque fois que les nuages se dissipent un instant, la vue se dévoile comme par enchantement. Par ailleurs, la vie est plutôt rustique : alimentation locale simple et végétarienne, seau d'eau chauffée sur le poêle pour la douche, éclairage à la bougie quand il n'y a plus d'électricité. La chambre n'est pas pour autant inconfortable et elle est plutôt joliment décorée. Les enfants ont un bureau pour faire leur travail du soir, tenir un journal de voyage pour Adèle. En bref, ce séjour à Wild Walkers se vit comme une parenthèse idéale pour se ressourcer.
Chaque fois que les nuages se dissipent un instant, la vue se dévoile comme par enchantement. Par ailleurs, la vie est plutôt rustique : alimentation locale simple et végétarienne, seau d'eau chauffée sur le poêle pour la douche, éclairage à la bougie quand il n'y a plus d'électricité. La chambre n'est pas pour autant inconfortable et elle est plutôt joliment décorée. Les enfants ont un bureau pour faire leur travail du soir, tenir un journal de voyage pour Adèle. En bref, ce séjour à Wild Walkers se vit comme une parenthèse idéale pour se ressourcer.
Par ailleurs, la vie est plutôt rustique : alimentation locale simple et végétarienne, seau d'eau chauffée sur le poêle pour la douche, éclairage à la bougie quand il n'y a plus d'électricité. La chambre n'est pas pour autant inconfortable et elle est plutôt joliment décorée. Les enfants ont un bureau pour faire leur travail du soir, tenir un journal de voyage pour Adèle. En bref, ce séjour à Wild Walkers se vit comme une parenthèse idéale pour se ressourcer.
En bref, ce séjour à Wild Walkers se vit comme une parenthèse idéale pour se ressourcer.
Le temps du retour
Le voyage de retour se révèle plus compliqué que prévu. Nous avons un avion dans l'après-midi à Coimbatore. Il faut quitter le gîte de bonne heure et faire marcher les enfants dans la forêt sous la pluie pour retrouver la voiture. Lakshmikant décide de passer par la route de Kotagiri pour éviter le trafic du samedi sur la route principale. Au bout du compte, nous nous perdons de nombreuses fois. Les kilomètres en plus sur des routes de montagnes rallongent considérablement le trajet. Enfin dans la plaine, l'aéroport n'est pas indiqué et la cartographie du GPS se révèle défaillante.
En Inde, une poignée de véhicules suffit à créer un embouteillage. Ajoutons des ralentisseurs dans chaque village, une procession autour d'une idole, ou encore un barrage de police, et l'heure estimée d'arrivée sur le GPS se décale inlassablement vers l'heure de départ de notre avion. Nous arrivons au dernier moment à l'aéroport, et retrouvons Chennai le soir-même comme prévu.