Zhongdian et Deqin
rédigé et mis en ligne en décembre 2016
Cette première incursion dans les régions tibétaines a eu lieu au Yunnan, fin novembre et début décembre 1996. Zhongdian n’était pas accessible en avion à l’époque (l’aéroport a ouvert en 1999). Venant de Lijiang et du pays naxi, une journée de route (175 km) était nécessaire pour rejoindre Zhongdian (99° 36’E, 27° 50’N, alt. 3 200 m). On rejoignait la rivière Jinsha, cours supérieur du Yangtze, au village de Shigu où elle fait un coude et repart vers le nord-est.
Cette région tibétaine, la première en venant de Dali et Lijiang, était connue à l’époque sous son seul nom tibétain de Gyalthang et elle était encore peu connue et peu visitée. Cinq ans plus tard, elle fut rebaptisée "Shangri La" (du nom d’une vallée tibétaine imaginaire réputée idyllique) afin d’attirer les touristes et elle en attire en effet depuis lors des millions chaque année, comme Thibaut a pu constater fin 2009. Le "Shangri La" du Yunnan s’est transformé en un petit Disneyland tibétain, avec les effets que l’on imagine aisément.
Mais en 1996, le tourisme était encore très peu développé, surtout fin novembre. Non loin du petit quartier central de Zhongdian, le village de Songzanlin était un vrai village tibétain et le monastère local, construit au 17ème siècle, souvent comparé au Potala était tout à fait authentique, tel qu’en lui-même.
Sans présenter de difficulté particulière, la route en direction du Tibet était sinueuse et lente, avec des cols à gravir pour passer de la vallée du Yangtze à celle du Lancang (cours supérieur du Mékong). Dans une Beijing Jeep 212 inconfortable, on cheminait lentement, en arrêtant le moteur dans les descentes, bien que j’aie pris la précaution de recruter deux conducteurs afin qu’ils puissent se reposer à tour de rôle.
A Benzilan, la route et le fleuve longent pendant quelques kilomètres la province voisine du Sichuan.
Puis, après un col (Yak La) à 4 230 m, descente sur la petite ville de Deqin (98° 59’E, 28° 12’ N, alt. 3480 m). La ville était à l’époque fermée aux étrangers mais j’avais pu obtenir sans difficulté un permis de la police, ma connaissance limitée du chinois m’ayant sans doute plutôt servi en la circonstance. Les nuits sont froides fin novembre à cette altitude : - 15° C et pas de chauffage.
Dix kilomètres après Deqin, le lendemain matin, visite du monastère de Feilai et vue magnifique par grand beau temps sur le massif du Meilixue qui culmine au Kawagebo, à 6 740 m. J’étais seul, sur la ligne de crête, pour admirer le spectacle. Lorsque Thibaut s’y est rendu treize ans plus tard, l’endroit était devenu une attraction touristique majeure et un mur avait été construit afin qu’il ne soit pas possible de voir la montagne sans acquitter un droit.
Mais ce belvédère était la fin de la route. Plus au nord, on arriverait très vite (75 km) dans la région autonome du Tibet (première ville Markam, à 214 km). La Birmanie est à 100 km à l’ouest, au delà de la rivière Nak (cours supérieur du Salouen) et l’Arunachal Pradesh indien à guère plus de 200 km. Il faudrait un permis d’accès au Tibet pour continuer vers le nord et de tels permis sont quasiment impossibles à obtenir. Même en 2013, nous n’avons pu en obtenir pour cet itinéraire et avons dû gagner Lhassa par le Qinghai (voir notre article).
Il a donc fallu faire demi-tour et redescendre jusqu’à Lijiang, avant d’aller explorer la belle région du lac Lugu.